Par : Sonia Arnal – Le Matin Dimanche 29.12.2013
L’année 2013 fut une année pas comme les autres pour Stanislas Wawrinka. En janvier, il scotche les spectateurs plus de cinq heures à leur fauteuil dans un match d’anthologie contre Djokovic. On la fait courte: dans la foulée, il battra les meilleurs, de Murray à Ferrer en passant par Berdych et Gasquet. Apothéose: il finit cette spectaculaire épopée par une qualification pour le saint des saints, le Masters de Londres.
En soi, cela serait déjà suffisant pour le distinguer comme Suisse de l’année. Mais il y a la manière. Et c’est là que le qualificatif prend toute sa mesure: Stanislas Wawrinka, c’est la suissitude, les contradictions, les complexités et les forces du pays à lui tout seul.
Ça commence par un nom polonais, hérité d’un père allemand. Eh oui, être Suisse, c’est souvent être un peu d’ailleurs. Ça continue avec la religion, protestante, qu’il faut assumer dans un petit village, catholique, du Gros-de- Vaud. Ça se poursuit avec une carrière construite par la volonté, dans l’effort, et pas dans la facilité ni la frime. «Il s’est fait en bossant, comme la Suisse», dit de lui Nicolas Bideau. D’ailleurs sa notoriété a explosé suite à sa… défaite face à Djokovic, c’est dire si, pour la nation, ne pas lâcher, tenir bon dans l’adversité compte plus que gagner.
Et puis il a un grand voisin encombrant, qui à la fois lui fait du tort et lui rend bien service – Roger Federer, c’est son Allemagne ou sa France à lui. «Toute ma vie, j’ai dû mener une rivalité impossible», avoue-t-il.
Enfin, il ne se la pète pas. Et il est tout sauf blasé: il avoue qu’il a vécu six semaines la peur au ventre à l’idée d’échouer sur le pas de la porte du Masters et que, quand enfin il y est allé, c’était comme de passer de l’autre côté de la TV.
Bref, il trouve qu’il n’est pas un héros, juste «un mec qui a beaucoup travaillé et beaucoup échoué». Un peu comme chacun de nous.
Sonia Arnal
Rédactrice en chef adjointe, Le Matin Dimanche